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le traité de tafna de l'emir abdelkader

Publié le 27 Août 2014

      

Traité de la Tafna 1837 (en Dialecte Algérien)

Traité de la Tafna ميتاق مكتوب بين الـجينيرال بيجو و لامير عبد الـقادر ف 1837

Comme tout le monde le sait, le fameux traité de la Tafna entre L'émir Abdelkader et le Général Bugeaud, était rédigé en dialecte Algérien, la langue d'alors. Les linguistes arabes d'autrefois appelaient *notre langue. « al-maghribi ». Une appellation bien plus prestigieuse que « darija »

Voici un extrait, fidèle à l'original.


الجينرال الحاكم جيوش الڢرنصيص في بلاد وهران وأمير المومنين السيد الحاج عبد الفادر بن محي الدين رضيوا ڢي الشروط الاتيه ادناه

شرط اول
من اليوم وصاعدا يبطل الطراد بين الڢرنصيص والعرب.
الجنيرال حاكم جيوش الڢرنصيص وامير المومنين عبد الفادر
كل واحد من ناحيته يعمل جهده لكى تحصل المودة والعهد الذى يلزم
ان تكون بين شعبين اللذين مقدر عليهم من عند الله ان يميشوا تحت
حكم واحد. ولاجل هذا امير المومنين لازم يرسل من عنده ثلاثة
فناصل واحد لوهران واحد لارزيو وواحد لمستغانم. والجينرال كذلك
يرسل من عنده فناصل لمعسكر بيش ما يكون النزاع بين الڢرنصيص والعرب





 

 

 

 

 

 

     

 

                          

 

OUR expliquer les circonstances qui amenèrent le traité de la Tafna, il nous faut retourner à Oran. Dès son arrivée, le général Bugeaud avait lancé un manifeste menaçant contre les tribus qui se montreraient hostiles à la France; cependant, tout en se préparant à la guerre, il entamait des négociations avec Abd-el-Kader. Le juif Ben Durand lui servit d’intermédiaire; mais, soit que l’émir se défiât des lenteurs apportées par cet agent, soit qu’il espérât accroître la mésintelligence qu’il savait exister déjà entre les deux généraux, il prit tout à coup le parti de faire directement des ouvertures au gouverneur général. Celui-ci lui répondit qu’il ne serait pas éloigné d’accueillir ses propositions, et informa le ministère des bases sur lesquelles il pensait qu l’on pouvait traiter : elles renfermaient Abd-el-Kader dans les limites du Chélif.

Ayant eu connaissance de cette négociation, le général Bugeaud adressa des reproches assez vifs au comte Damrémont, qui, se croyant dans son droit, répondit sur le même ton; mais bientôt, convaincu que son collègue avait seul mission pour traiter avec l’émir, il écrivit à ce dernier que désormais il devait s’entendre avec le général commandant la division d’Oran, ne se réservant à lui-même que le droit de sanction. Cependant les prétentions d’Abd-el-Kader parurent si exagérées au général Bugeaud, que les pourparlers furent suspendus. Alors le général partit d’Oran, à la tête de neuf mille hommes, se dirigeant sur Tlemcen qu’il ravitailla, puis sur la Tafna, qu’il atteignit le 23 mai, sans avoir eu dans toutes ces marches que quelques coups de fusil à échanger avec les Arabes.

Dans cet intervalle, l’émir chargea Ben Durand d’annoncer à M. Bugeaud qu’il était tout disposé à traiter avec lui pour la province d’Oran; quant à celles de Tittery et d’Alger, il se réservait de s’entendre avec le gouverneur général. Mais M. Bugeaud, qui déjà commençait à se défier de la bonne foi de Durand, changea d’intermédiaire et se servit de Sidi-Hamadi-Ben-Seal, un de ses affidés. Ce dernier revint bientôt porteur de propositions d’Abd-el-Kader qui parurent au général pouvoir servir de bases à un arrangement convenable.

Nous voici arrivés au trop célèbre traité de la Tafna, qui a attiré à son auteur des reproches de plus d’un genre; mais nous ne nous occuperons ici que du document officiel et des clauses authentiques. N’obéissant qu’à sa propre impulsion, le général Bugeaud rédigea le projet du traité sans tenir aucun compte des instructions qu’il avait reçues; ainsi, il lui était recommandé de tenir Abd-el-Kader au delà du Chélif, et il céda la province de Tittery. De son côté, il annonçait que l’émir se soumettrait à payer un tribut à la France, en signe de vassalité. Cette clause virtuelle fut rayée par Abd-el-Kader. Habitué à beaucoup prendre sous sa responsabilité, le général pensa que le ministère ne s’arrêterait pas à ces accessoires, et crut devoir passer outre. Au reste, il ne se trompait pas ; car, avant la conclusion définitive, une dépêche ministérielle l’autorisait à abandonner la province de Tittery, s’il le jugeait convenable. Sous cette déplorable influence, le traité suivant fut4 signé et échangé.

ART. 1 L’émir reconnaît la souveraineté de la France en Afrique.

ART. 2. La France se réserve dans la province d’Oran Mostaganem, Mazagran et leurs territoires ; Oran, Arzew; plus un territoire ainsi délimité: à l’est, par la rivière de la Macta et le marais d’où elle sort; au sud, une ligne partant du marais ci-dessus mentionné, passant par le bord sud’ du lac Sebgha et se prolongeant jusqu’à l’Oued-Malad (Rio Salado), dans la direction de Sidi-Saïd; et de cette rivière jusqu’à la mer; de manière que tout le terrain compris dans ce périmètre soit territoire français.
Dans la province d’Alger: Alger, le Sahel, la plaine de Mitidja, bornée à l’est jusqu’à l’Oued-Khadra et au delà; au sud, par la première crête de la première chaîne du petit Atlas jusqu’à la Chiffa, en y comprenant Blida et son territoire; à l’ouest par la Chiffa jusqu’au coude de Mazagran, et de là par une ligne droite jusqu’à la mer, renfermant Coléah et son territoire, de manière à ce que tout le terrain compris dans ce périmètre soit territoire français.

ART. 3. L’émir administrera la province d’Oran, celle de Tittery, et la partie de celle d’Alger qui n’est pas comprise, à l’ouest, dans les limites indiquées à l’article 2. Il ne pourra pénétrer dans aucune partie de la régence.

ART. 4. L’émir n’aura aucune autorité sur les musulmans qui voudront habiter sur le territoire réservé à la France; mais ceux-ci resteront libres d’aller vivre sur le territoire dont l’émir a l’administration, comme les habitants du territoire de l’émir pourront venir s’établir sur le territoire français.

ART. 5. Les Arabes vivant sur le territoire français exerceront librement leur religion. Ils pourront y bâtir des mosquées et suivre en tout point leur discipline religieuse, sous l’autorité de leurs chefs spirituels.

ART. 6. L’émir donnera à l’armée française: trente mille fanègues (d’Orient) de froment, trente mille fanègues (d’Orient) d’orge, cinq mille bœufs. La livraison de ces denrées se fera à Oran par tiers; la première aura lieu du 1er au 15 septembre 1837, et les deux autres de deux en deux mois.

ART. 7. L’émir achètera en France la poudre, le soufre et les armes dont il aura besoin.

ART. 8. Les Koulouglis qui voudront rester à Tlemcen, ou ailleurs, y posséderont librement leurs propriétés et y seront traités comme les Hadars. Ceux qui voudront se retirer sur le territoire français pourront vendre ou affermer librement leurs propriétés.

ART. 9. La France cède à l’émir: Harshgoun, Tlemcen, le Mechouar et les canons qui étaient anciennement dans cette dernière citadelle. L’émir s’oblige à faire transporter à Oran tous les effets, ainsi que les munitions de guerre et de bouche de la garnison de Tlemcen.

ART. 10. Le commerce sera libre entre les Arabes et les Français qui pourront s’établir réciproquement sur l’un ou l’autre territoire.

ART. 11. Les Français seront respectés chez les Arabes comme les Arabes chez les Français. Les fermes et les propriétés que les sujets français auront acquises ou acquerront sur le territoire arabe leur seront garanties; ils en jouiront librement; et l’émir s’oblige à leur rembourser les dommages que les Arabes leur feraient éprouver.

ART. 12. Les criminels des deux territoires seront réciproquement rendus.

ART. 13. L’émir s’engage à ne concéder aucun point du littoral à une puissance quelconque sans l’autorisation de la France.

ART. 14. Le commerce de la régence ne pourra se faire que dans les ports occupés par la France.

ART. 15. La France pourra entretenir des agents auprès de l’émir et dans les villes soumises à son administration, pour servir d’intermédiaires près de lui aux sujets français, pour les contestations commerciales ou autres qu’ils pourraient avoir avec les Arabes. L’émir jouira de la même faculté dans les villes et ports français.

Tafna, le 30 mai 1837.

Le lieutenant général commandant la province d’Oran,

Signé: BUGEAUD.

Cachet du général Bugeaud. Cachet d’Abd-el-Kader.

Après l’échange du traité, le général Bugeaud fit proposer à Abd-el-Kader une entrevue pour le lendemain à trois lieues des bords de la Tafna. Dès neuf heures du matin, le général était à l’endroit indiqué, accompagné de six bataillons d’infanterie, de deux escadrons de cavalerie et de quelques pièces de campagne. Abd-el-Kader ne s’y trouva pas; il est vrai de dire que sept lieues le séparaient du rendez-vous, tandis que le général français n’en avait eu que trois à faire. Cinq heures s’écoulèrent à attendre, sans que personne se présentât; enfin, vers deux heures après midi, des cavaliers arabes annoncèrent que l’émir avait été malade et n’avait pu quitter son camp que fort tard; qu’il marchait lentement, et qu’il serait peut-être convenable que le général s’avançât encore. Toutes ses excuses satisfaisaient peu M. Bugeaud; mais enfin il était tard, et il ne voulait pas retourner dans son camp sans avoir vu Abd-el-Kader. Il poussa donc en avant. Après avoir franchi des vallons et des collines sans rien rencontrer encore, on signala, au détour d’une gorge étroite le chef de la tribu des Oulassahs ; il venait au-devant du général français pour lui dire qu’Abd-el-Kader se trouvait près de là sur un coteau, et offrit de l’y conduire. La condescendance du général était à bout; cependant il suivit son obligeant cicérone; pendant ce temps l’émir, au repos, disait aux chefs arabes dont il était entouré : « J’attends l’hommage que le sultan de France vient me rendre. » Lorsque le général Bugeaud eut marché pendant un quart d’heure sous la conduite de son guide, il aperçut enfin, sur un mamelon, l’émir au milieu d’un groupe considérable de cavaliers; les contingents arabes et kabyles, au nombre de dix mille, couronnaient toutes les collines environnantes. Alors seulement Abd-el-Kader s’avança du côté de la petite troupe, en tête de laquelle se trouvait le général Bugeaud. Le cortège de l’émir avait un aspect réellement imposant : on pouvait y compter cent cinquante ou deux cents chefs, tous revêtus de riches costumes, tous montés sur de magnifiques coursiers qu’ils maniaient avec une grande habileté ; Abd-el-Kader ne leur cédait ni en adresse ni en magnificence; il les précédait de quelques pas, guidant un beau cheval noir merveilleusement dressé: tantôt il l’enlevait des quatre pieds à la fois, tantôt il le faisait marcher sur les deux pieds de derrière; et tous ces mouvements, il les exécutait avec la plus grande aisance, comme sans y penser; six domestiques rangés autour de lui surveillaient les différentes parties du harnachement.

 

ès qu’il fut à portée de la voix, le général Bugeaud, lançant son cheval au galop, arriva sur l’émir en lui tendant cavalièrement la main; Abd-el-Kader la prit et la serra affectueusement; puis il demanda au général des nouvelles de sa santé. « Fort bien, lui répond celui-ci, et toi ? » Puis, pour abréger les longs préliminaires du cérémonial arabe, il met pied à terre et engage Abd-el-Kader à en faire autant. L’émir sauta à bas de son cheval avec une prestesse sans égale et s’assit immédiatement. C’était calcul de sa part, il voulait ainsi prouver aux siens sa supériorité. Le général s’aperçut de son intention et se plaça aussitôt auprès de lui. Alors une musique criarde et assourdissante, composée de hautbois et de tamtams, commença à préluder ; elle eût rendu tout entretien impossible, le général Bugeaud la fit retirer et engagea la conversation en ces termes

« Sais-tu, qu'il y a peu de généraux qui eussent osé signer le traité que j’ai conclu avec toi. Je n’ai pas craint de t’agrandir et d’ajouter à ta puissance, parce que je suis assuré que tu ne feras usage de la grande existence que nous te donnons, que pour améliorer le sort de la nation arabe et la maintenir en paix et en bonne intelligence avec la France.

— Je te remercie de tes bons sentiments pour moi, répondit Abd-el-Kader; si Dieu le veut, je ferai le bonheur des Arabes; et si la paix est jamais rompue, ce ne sera pas de ma faute.

— Sur ce point, je me suis porté ta caution auprès du roi des Français.

— Tu ne risques rien à le faire; nous avons une religion et des mœurs qui nous obligent à tenir notre parole; je n’y ai jamais manqué.

— Je compte là-dessus, et c’est à ce titre que je t’offre mon amitié particulière.

— J’accepte ton amitié, mais que les Français prennent garde à ne pas écouter les intrigants.

— Les Français ne se laissent conduire par personne, et ce ne sont pas quelques faits particuliers, commis par des individus, qui pourront rompre la paix : ce serait l’inexécution d’un traité ou un grand acte d’hostilité. Quant aux faits coupables des particuliers, nous nous en préviendrons, et nous les punirons réciproquement.

— C’est très bien; tu n’as qu’à me prévenir, et les coupables seront punis. Je te recommande les Koulouglis qui resteront à Tlemcen.

— Tu peux être tranquille, ils seront traités comme les Hadars (les Maures). Mais tu m’as promis de mettre les Douers dans le pays de Hafra (partie des montagnes entre la mer et le lac Sebkha).

— Le pays de Hafra ne serait peut-être pas suffisant; mais ils seront placés de manière à ne pouvoir nuire ait maintien de la paix.

— As-tu ordonné, reprit le général Bugeaud après un moment de silence, de rétablir les relations commerciales à Alger et autour de toutes nos villes ?
Non, je le ferai dès que tu m’auras rendu Tlemcen.

— Tu sais bien que je ne puis le rendre que quand le traité aura été approuvé par mon roi.

— Tu n’as donc pas le pouvoir de traiter ?

— Si, mais il faut que le traité soit approuvé cela est nécessaire pour ta garantie, car s’il était fait par moi tout seul, un autre général qui me remplacerait pourrait le défaire au lieu qu’étant approuvé par le roi, mon successeur sera obligé de le maintenir.

— Si tu ne me rends pas Tlemcen, comme tu le promets dans le traité, je ne vois pas la nécessité de faire la paix; ce ne sera qu’une trêve.

— Cela est vrai; ceci peut n’être qu’une trêve; mais c’est toi qui gagnes à cette trêve; car pendant le temps qu’elle existe je ne détruirai pas les moissons.

— Tu peux les détruire, cela nous est égal; et à présent que nous avons fait la paix, je te donnerai par écrit l’autorisation de détruire tout ce que tu pourras; tu ne peux en détruire qu’une bien faible partie et les Arabes ne manquent pas de grains.

— Je croîs que les Arabes ne pensent pas tous comme toi; car je vois qu’ils désirent bien la paix, et quelques-uns m ont remercié d’avoir ménagé les moissons, depuis la Schika jusqu’ici, comme je l’avais promis à Amady-Sakal.
Ici Abd-el-Kader sourit d’un air dédaigneux, puis demanda combien il fallait de temps pour avoir l’approbation du roi des Français.

— Il faut trois semaines.

— C’est bien long.

— Tu ne risques rien moi seul pourrais y perdre.

Le lieutenant de l’émir, Ben-Arah, qui venait de s’approcher, dit alors au général :

— C’est trop long, trois semaines; il ne faut pas attendre cela plus de dix à quinze jours.

— Est-ce que tu commandes à la mer ? répliqua le général français.

— Eh bien, en ce cas, reprit Abd-el-Kader, nous ne rétablirons les relations commerciales qu’après que l’approbation du roi sera arrivée et quand la paix sera définitive.

— C’est à tes coreligionnaires que tu fais le plus de tort; car tu les prives du commerce dont ils ont besoin; et nous, nous pouvons nous en passer, puisque nous recevons par la mer tout ce qui nous est nécessaire. »

Le général Bugeaud, ne voulant pas prolonger plus longtemps cet entretien, se leva brusquement; cependant Abd-el-Kader restait toujours assis et mettait une espèce d’affectation à échanger quelques paroles avec le général qui était debout devant lui. M. Bugeaud s’aperçut de l’intention, et prenant vivement la main de l’émir, il l’enlève en lui disant d’un ton familier « Parbleu, lorsqu’un général français se lève, tu peux bien aussi te lever, toi. » Ainsi se termina cette entrevue, qui fut sans résultats car elle était sans but.

Rédigé par Guerri

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